lundi 22 décembre 2014

Bams répond à Emily Loizeau qui a traité les opposants à Exhibit B de personnes de mauvaise foi et non dotées d'un cerveau humain


Bams répond à Emily Loizeau qui a traité les opposants à Exhibit B de personnes de mauvaise foi et non dotées d'un cerveau humain



Ai pris le temps de répondre à l'artiste Emily Loizeau :

Emily Loizeau poste le 9 déc : Retour du 104 ce soir. 

Merci à Brett Bailey, merci aux comédiens d'Exhibit B de nous offrir une oeuvre qui éprouve, dérange, déstabilise, heurte, émeuve, donne à penser… merci pour votre courage, votre justesse.
Merci de veiller sur notre mémoire.
Merci au 104 et au TGP de nous offrir l'espace pour vivre cette expérience.
Exhibit B est une oeuvre qui fait appel à nos consciences et nous met face à nos responsabilités. Elle dit ce que tous les manuels d'histoire n'ont jamais dit et ne pourront jamais vraiment dire.
Ce spectacle permet d'entendre, de ressentir, d'apprendre et de se recueillir…
Puisse-t-il se jouer longtemps et provoquer pour longtemps de longues et profondes discussions, où chacun puisse exprimer et échanger sur son émotion, sa stupeur, sa honte, sa colère…. et construire.
Puisse ces longues discussions prendre à jamais le pas sur le silence tonitruant que d'autres réclament sans avoir rien vu de ce qu'ils dénoncent.
Parce qu'il faut arrêter les conneries cinq minutes, ce spectacle peut poser de vraies questions mais soyons clairs, nulle personne de bonne foi, dotée d'un cerveau humain, d'une capacité à lire et à comprendre ce qu'il lit ne peut l'espace d'un millième de seconde envisager que cette oeuvre soit une oeuvre raciste.
http://www.104.fr/programmation/evenement.html?evenement=358

Ma réponse: 


Mlle, je suis membre du Collectif Contre Exhibit B et il me semble important de répondre à vos insultes. " Parce qu'il faut arrêter les conneries cinq minutes, ce spectacle peut poser de vraies questions mais soyons clairs, nulle personne de bonne foi, dotée d'un cerveau humain, d'une capacité à lire et à comprendre ce qu'il lit ne peut l'espace d'un millième de seconde envisager que cette oeuvre soit une oeuvre raciste. " Nous pouvons ne pas partager les mêmes idées et contrairement à vous, nous ne nous sommes jamais permis d'insulter nos détracteurs. Ce comportement est quand même très révélateur de cette caste " dominante privilégiée majoritairement blanche " qui dans cette histoire est celle qui porte insultes, marque le rapport de force, joue les donneurs de leçon " nous ne savons pas lire l'art etc... " Toujours le même côté, le votre... Celui des partisans d'Exhibit B. Pour votre info, nous avons demandé le débat depuis le début, il nous a été constamment refusé. La caste blanche, rejoint par quelques noirs privilégiés cultureux ravis de sauter sur l'occasion de faire patte blanche, veut bien se dire anti raciste et universaliste, si c'est elle qui définit CE QUI est raciste, COMMENT le définir et QUOI en dire mais si les racisés ( en l'occurence dans le cas présent, les noirs ) osent s'emparer de la question, là, on leur envoie les CRS. 

Je suis d'autant plus attristée, qu'au mépris, qu'au prix, de NOTRE indignation, notre souffrance, notre douleur vous ayez pu gouter avec délectation, émotion et force à ce qu'est l'humiliation subie par le peuple noir. À mes yeux, ceci ne prouve qu'une chose... Rien n'a changé... Un artiste blanc instrumentalise des corps noirs pour un public blanc, pour que vous autres découvrez ce qui devrait être enseigné dans les livres d'histoire. Mais encore faudrait-il que vous, mlle, blanche, ayez l'humilité, l'universalisme d'accepter de vous déplacer de votre condition de blanche pour entendre cette parole de noire que je partage avec vous. Ce travail, nous, ces nouveaux visages français, noirs, le faisons depuis que nous sommes nés. S'identifier aux personnages toujours blancs des livres, des films, des Opéras, des pièces, de tout ce qui contribue à façonner l'imaginaire collectif, nous, noirs, arabes pourtant français comme vous, avons bien appris à le faire, devoir se déplacer pour pouvoir nous aussi vivre l'émotion artistique. Même si constamment malmenés, lorsque pour une fois un personnage noir existe, il est... Samba, l"émigré, l'intouchable caillera, Fatou la malienne etc... Oui Mlle, cette essentialisation à réduire nos représentations dans des figures clichées, dégradantes, méprisantes et réductrices est insupportable, perpétuelle et raciste. Et oui, votre Bailey, aussi plein de bonnes intentions ne fait que reproduire l'humiliation pour soit disant la dénoncer. Cette installation n'apporte rien, ne nourrit aucune analyse quant aux mécanismes qui font cette humiliation. On exhibe juste la victime, noire et se garde bien de montrer aussi PHYSIQUEMENT, comme ces pauvres victimes noires, l'oppresseur BLANC machette à la main qui coupait les mains et les jambes, pic à la main, qui perçait les yeux, pantalon baissé qui violait nos femmes... Peu importe l'inconfort que ce miroir me renvoie, tant qu'on prend soin du votre. On doit donc aujourd'hui comprendre, à coup de CRS, que reproduire = dénoncer. Vive le progrés, vive le 21 ème siècle, de mieux en mieux !!! 

Bailey partialise et essentialise et le noir et le blanc, ne raconte ni l'histoire, ni l'oppresseur, blanc, ni la résistance, noire. Juste contribue à, une fois de plus, enfermer le corps noir dans une forme négative et humiliante. Mais bien sûr, vous savez tout mieux que nous, comment dîtes vous déjà, nous qui ne sommes pas " dotée d'un cerveau humain, d'une capacité à lire et à comprendre ce qu'il lit ". Je ferai suivre aux 20 000 signataires français, aux 23 000 signataires anglais, aux milliers de manifestants... Heureusement la grande Emily Loizeau va nous apprendre à lire et va nous apprendre comment ce qui parle de nous est bon pour nous. Je suis artiste comme vous Mlle, auteure ENGAGÉE-compositrice et interprète et l'art n'est pas au dessus de tout et pour ma part le projet de société que j'ai envie de défendre et dans lequel j'ai envie de m'inscrire est celui qui respecte les sensibilités de chacun. Car quand on blesse, il me semble juste humain, d'arrêter ! Et si aujourd'hui tout le monde en France trouverait UNANIMEMENT abjecte de reconstituer des fours crématoires avec des figurants juifs squelettiques pour dénoncer la Soah, c'est parce que cette histoire on nous l'a enseignée, on la connait et qu'à ce sujet, l'état français a fait son travail. Le génocide juif nous a été enseigné à l'école. Alors je le redis... Que l'état français commence à faire son travail quant à l'histoire noire qui pour l'instant n'est que dans les pages blanches de ces livres avant de venir de manières aussi brutales convoquer cette imagerie stigmatisante. En 2014, remettre des noirs en cage pour dénoncer le racisme est intolérable et nous continuerons à nous battre contre ça. J'ai une question pour vous, peut-être avez vous la réponse. Comment se construire - alors qu'on a déjà assez de mal une porter une mémoire positive autour de ces thématiques mémorielles - Comment se projeter en bon citoyen dans une société qui nous renvoie continuellement des images de nos parents, nos arrières grands parents SOUMIS - SOUS HOMMES - MUETS, tel des 'bien meuble' comme le définissait le code noir, programme politique qui a écrit et défini l'esclavage. Si vous avez la réponse Mlle l'anti raciste auto décrétée, je veux bien même si je n'ai pas un cerveau d'humain et que je ne sais pas lire. 
 Bams artiste et membre du collectif Contre Exhibit B

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